By Choice, not By Chance

- Par Choix, non par Hasard -

La publication, hier 14 novembre 2012, du rapport annuel de l'UNFPA a été relayée par plusieurs journaux dont Le Monde. On en retiendra surtout le fait que pour l'agence onusienne « La planification familiale volontaire est un droit fondamental de la personne » et l'on ne peut qu'espérer que cette notion "juridique", relativement nouvelle à notre connaissance, permettra de faire avancer la situation des femmes ainsi que la cause d'une démographie plus modeste au niveau de la planète.

Le docteur Babatunde Osotimehin, secrétaire exécutif de l'UNFPA a déclaré : « dans tous les pays dans lesquels je me rends, les femmes veulent avoir moins d'enfants, mais disent n'avoir ni le pouvoir ni les moyens d'éviter une grossesse non désirée ». Or selon le rapport, près de la moitié des 80 millions de grossesses non désirées qui surviendront dans les pays en développement (en 2012) aboutiront à un avortement. Selon Yves Bergerin, coordinateur de la santé maternelle à l'UNFPA, « il y a 287 000 cas de mortalité maternelle et si une femme a six ou sept enfants, elle a un risque sur sept de mourir pour une de ces grossesses » et il réclame « une volonté politique plus résolue ».

Lors du sommet de Londres, de juillet dernier, la communauté des bailleurs publics et privés, ainsi que les pays en développement, se sont engagés à verser 4,6 milliards de dollars pour assurer l'accès à la planification familiale à 120 millions de femmes supplémentaires d'ici à 2020. La France, elle, s'est engagée à consacrer 500 millions d'euros à la réduction de la mortalité infantile, sur la période 2011-2015, dont 100 millions pour soutenir les programmes de santé reproductive dans neuf pays d'Afrique francophone.

Mais selon l'agence, 867 millions de femmes sont en âge de procréer dans les pays en voie de développement et 222 millions d'entre elles ne bénéficient d'aucune politique de planification familiale. Ses experts estiment qu'il faudrait mobiliser environ 8 milliards de dollars par an (6,3 milliards d'euros) pour assurer une planification familiale universelle et de qualité, soit environ le double des sommes dépensées actuellement.

Pour illustrer la situation plus que problématique de nombreuses femmes des pays en développement, nous avons choisi de faire référence, via l'article ci-dessous, au cas du Sénégal et plus particulièrement à celui de la communauté rurale de Makacoulibantang située dans la région de Tambacounda. Cette localité a en effet été choisie pour abriter le lancement d'une campagne de promotion de la planification familiale qui se déroulera du 28 novembre au 10 décembre prochain. Et pour cause : Maka enregistre le plus faible taux de prévalence contraceptive (0,3%) de la région de Tambacounda, soit largement en deçà du taux régional de 4%, qui lui même, est l’un des plus faibles du pays dont la moyenne nationale est de l’ordre de 12%...

Article de Seneweb.com publié le 3 septembre dernier

Entre risques de répudiation et clandestinité dans la pratique : le chemin de croix des femmes

A Makacoulibantang, l’espacement des naissances n’est pas le plat favori des hommes. Dans ce village conservateur peuplé de mandingues à 90 %, la planification familiale est l’affaire des… autres. C’est la conviction de Makhtar et de Samba Bâ qui se soucient peu de l’état de santé de leurs épouses prétextant que le Coran encourage les multiples naissances, pour propager l’Islam.

«Je n’y crois pas trop ces choses. Mon épouse a 21 ans et elle a trois enfants. Jusque-là, elle n’a jamais eu de problèmes de santé liés à sa maternité. Et puis cette planification familiale est une affaire de toubab (européens) qu’on veut nous imposer alors que c’est contraire aux enseignements du Prophète », explique Makhtar la quarantaine bien sonnée. Cet homme au physique de type sahélien, paysan de son état, ne semble pas prêt à baliser le chemin à son épouse qui lui a exprimé le besoin d’espacer la naissance de ses enfants.

Itou pour Samba qui n’a que très peu apprécié la question ! L’espacement des naissances n’est manifestement pas son dada. Déjà père de quatre enfants, tous d’une même femme, il est en voie d’être père une nouvelle fois, malgré son jeune âge (27 ans). Également paysan dans le village de Maka, l’homme d’une imposante taille, a la même conception de la planification familiale que les milliers d’autres hommes de ce patelin.

Mais malgré tout, le sous-préfet de Maka, Oumar Dieng demeure optimiste : «Ce n’est pas impossible, mais ce sera difficile d’impliquer les hommes dans la planification familiale.» Avant d’ajouter entre deux sourires : «C’est une zone conservatrice et réfractaire à ces pratiques. Il y a surtout le facteur culturel qui bloque toutes les initiatives des Ong qui interviennent dans la zone.»

En réalité, le mal de Makacoulibantang réside dans l’analphabétisme de ses résidents. Plus de 90% de la population ne sait pas lire, encore moins écrire. Surtout les femmes qui sont encore ''esclaves'' des caprices de leur mari. Certaines d’entre elles, qui sont bien conscientes des dangers qu’elles courent avec les naissances rapprochées, prennent le risque d’adopter cette pratique.

C’est le cas de Coumba Cissokho, vieille de seulement 18 hivernages. «Je prends le risque de consommer des produits contraceptifs à l’insu de mon mari, après avoir parlé avec une ''bajjenu goxx'' (matrone de quartier). Je suis bien consciente des bienfaits de la planification familiale mais mon mari ne veut rien savoir de ces choses. Mais comme c’est de ma santé qu’il s’agit, j’ai pris mes responsabilités.»

Et Coumba n’est pas un cas isolé, nous confie Adja Marème Kane. Avec son statut de bajjenu goxx, Mme Kane n’a de cesse essayer de sensibiliser les hommes sur la Planification Familiale, toujours sans succès. Mais elle dit réussir tant bien que mal à convaincre certains hommes à aider leurs épouses en ce sens. Avant de révéler que beaucoup de femmes sont répudiées dans ces villages parce que leur mari ont appris qu’elles espaçaient, en cachette, les naissances de leurs enfants.

Illustration extraite de l'article que Jeune Afrique a consacré au sujet